Vous retrouverez dans cet article la déclaration liminaire de la FSU Oise pour le dernier CSA-départemental qui s’est tenu jeudi 4 avril à Beauvais :
Déclaration de la FSU au CSA-D · jeudi 4 avril
Monsieur le DASEN, Mesdames et messieurs les membres du CSAD,
Comme vous le savez, ce comité social départemental se réunit une fois de plus en pleine séquence de mobilisations contre un nouveau, un énième projet gouvernemental de casse de l’École Publique.
Évidemment l’Éducation Nationale est sous le choc. Sous le choc de la publication des textes, un dimanche en pleine nuit et aussi et surtout, du contenu annonce, officialisant, la fin du collège unique.
On en est bien là. Quoi que vous en pensiez : le « choc des savoirs » est une nouvelle attaque néo-libérale contre une école émancipatrice avec pour objectif le tri social des élèves. Il rompt avec l’objectif d’élévation des qualifications hérité du CNR et vise l’éviction la plus précoce possible, pour des raisons idéologiques et budgétaires, des élèves issu·es des classes populaires tout en décuplant une individualisation forcenée des apprentissages et une mise sous tutelle des pratiques enseignantes, prolétarisant ainsi toujours plus les personnels. Ainsi, les mesures chocs des savoirs forment un modèle d’École qu’on retrouve dans les projets politiques conservateurs et réactionnaires dont l’extrême droite.
La mobilisation, notamment dans les collèges, montre que les personnels ne sont pas dupes et qu’ils et elles veulent défendre un modèle scolaire radicalement opposé à celui du gouvernement, défendant la mixité sociale et scolaire, permettant aux élèves de construire un parcours scolaire émancipateur. Il s’agit d’un changement de paradigme éducatif. Personnels, parent·es, chercheur·euses ne sont pas dupes de cela. Ainsi, depuis le 1er février, la communauté éducative refuse ce choc des savoirs en lui opposant un choc des moyens, seul à même de répondre aux aspirations et nécessité de nos collègues et de nos élèves au quotidien. L’Élysée, Matignon et la rue de Grenelle sont isolés sur cette question qui touche profondément le pays.
C’est aussi dans ce contexte que le gouvernement fait le choix d’annuler plus de 600 millions d’euros de crédits. Cette décision va à contresens d’une véritable politique pour les services publics et notamment pour l’École publique mais sonne également comme un renoncement à toute revalorisation salariale ce qui nous réclamions, avec l’ensemble des agent·es de la fonction publique le 19 mars dernier et continuons encore de dire. Non au choc des moyens, oui au choc des salaires.
Rejeté unanimement par toute la communauté éducative avec les parents de la FCPE lors du CSE du 8 février dernier, l’arrêté modifiant l’organisation des enseignements dans les classes de collège a été publié en retirant la référence aux groupes de niveau. Mais la rédaction reste sans ambiguïté sur les intentions du gouvernement de passer en force sur leur organisation en mathématiques et français dès septembre en Sixième et Cinquième. La note de service tente de renforcer le poids des chef·fes d’établissement dans la mise en œuvre et entend leur faire jouer un rôle pédagogique avec les risques de l’annualisation, du co-enseignement imposé, d’une flexibilité managériale, de l’intervention de professeur·es des écoles au collège, non seulement dans l’accompagnement aux devoirs en Sixième et dans une nouvelle mouture de soutien sur tous les niveaux mais surtout dans les regroupements de mathématiques et de français d’après une note de service de la DGRH, ce à quoi s’oppose la FSU.
Et nos élèves de Segpa dans tout cela ? Vous en faites quoi ?
Et en éducation prioritaire, quel sera le meilleur niveau de celles et ceux regroupé·es en grand nombre ? Quelle aide pourra-t-on leur apporter ? La note de service précise que le regroupement surnuméraire ne sera pas la norme ! Le taux de réussite au DNB (diplôme national du brevet) des établissements risque de chuter plus fort encore en éducation prioritaire. Or à partir de la rentrée 2025, le DNB s’érigera comme un mur pour ces élèves qui ne pourront plus entrer en Seconde et seront relégué·es plus nombreuses et nombreux en prépa-Seconde. Cette classe avec des horaires et des contenus au rabais, viderait par ailleurs une partie de classes ordinaires de Seconde bac pro. Réservée aux élèves ayant échoué au DNB mais qui ne souhaitent aller ni en CAP ni en apprentissage, le gouvernement veut gérer les flux et redéfinir les finalités du système éducatif : répondre aux besoins de main-d’œuvre peu, voire pas qualifiée, de nombreux secteurs économiques, brandis par le patronat. C’est un renoncement à l’ambition scolaire pour toutes et tous les élèves, qui augure de nouvelles coupes budgétaires dans l’Education. La FSU refuse le principe d’un examen d’entrée au lycée.
En Seconde GT, les stages de juin installent l’idée que l’entreprise peut former la jeunesse dans la logique de la réforme de la voie professionnelle. Le suivi de ces stages n’incombe pas seulement aux collègues professeur·es principaux et principales. En permettant le SNU comme alternative au stage, le gouvernement organise de façon détournée et malhonnête la généralisation de ce dispositif d’embrigadement de la jeunesse. Pour la FSU, toutes ces mesures qui ciblent les élèves de Seconde doivent être abandonnées.
La logique du tri social est déjà à l’œuvre au lycée, de Parcoursup, dont la FSU demande l’abrogation, au libre choix des enseignements de spécialité qui renforce les inégalités sociales et genrées.
Dans notre département, la brutalité de la carte scolaire dans le premier degré et des DHG dans le secondaire a suscité et suscite encore des contestations associant enseignant⋅es, parents d’élèves et élu·es. Nationalement, près de 5 000 fermetures de classes sont comptabilisées dans le premier degré pour 2 800 ouvertures. Dans le second degré, N.Belloubet reprend à son compte la fable des moyens supplémentaires pour les groupes de niveau. Mais les suppressions de crédits révèlent définitivement cette imposture : mobiliser de la masse salariale dans un schéma d’emploi complémentaire, au besoin avec la bienveillance de Bercy était bien un leurre.
Le choc des savoirs et ses groupes de niveau, ségrégatif et désormais officiellement sans moyens, doivent être abandonnés. Aussi, la FSU se donnera tous les moyens possibles pour bloquer cette logique, de bloquer ce « choc ». Hier, aujourd’hui et demain ou après les vacances. Pas de moyens, pas de rentrée : tel pourrait être le slogan que nous crierons ici même et partout en France au retour des prochains congés.
Nous pouvons tout de suite vous le dire : nous ne trierons pas nos élèves. Ni dans les écoles, ni dans les collèges. Les personnels s’y refusent, s’y refuseront et le feront savoir. Nous ne faisons pas ce métier pour cela. Nous croyons en l’intérêt général, en la nécessité d’une École qui permette, par le savoir et la culture l’émancipation individuelle et collective. C’est pour cela que nous (et peut-être vous aussi?) sommes engagé·es dans nos métiers à tous les niveaux : des crèches à l’Université.