Conseil Départemental de l’Éducation Nationale du 22 octobre 2010

Déclaration préalable de la FSU Oise

Ce CDEN se tient à une période où se développe en France un mouvement social d’une ampleur exceptionnelle qui, depuis début septembre, a mobilisé des millions de salariés déterminés à obtenir le retrait d’un projet de réforme des retraites injuste et brutal ainsi que l’ouverture de négociations avec les syndicats pour une autre réforme.

L’ampleur des mobilisations confirme qu’au-delà de la réforme des retraites, l’emploi, les salaires, les conditions de travail mais aussi l’avenir des jeunes sont restés sans réponses efficaces notamment depuis l’aggravation des situations liée à la crise financière de 2008. La mobilisation des jeunes sur une question qui les concerne témoigne de l’inquiétude d’une génération confrontée de plus en plus au chômage et à la précarité. Le gouvernement répond à cette mobilisation par le déni et la FSU tient à condamner la répression dont les jeunes sont l’objet et appelle les personnels à accompagner et à aider les élèves afin d’éviter les incidents.

Face à la crise que traversent nos sociétés, aucune solution crédible et démocratique ne peut se concevoir sans une véritable « priorité à l’éducation ». Dans d’autres pays, les gouvernements misent sur l’éducation pour sortir de la crise. C’est le choix inverse qui prévaut en France, à tel point que la confiance des français envers l’école s’effrite (cf. sondage CSA). Pour la majorité des français (55%), les réformes vont dans le mauvais sens pour réduire l’échec scolaire et pour 75% d’entre eux, le non remplacement d’un enseignant sur deux aura des effets négatifs sur la réussite des élèves alors que la scolarisation des enfants de moins de trois ans est considérée comme une bonne chose (56%). Ce sont 32 000 postes supplémentaires qui seront supprimés entre 2010 et 2011, dans l’éducation (61364 depuis 2007) alors que nous subissons une baisse des recrutements sans précédents : on est passé de 22000 recrutements 1er et 2ème degré en 2007 à 11600 R 2011(soit pratiquement un volume de recrutements divisé par 2) et dans le seul premier degré, les recrutements sont passés de 12940 à la rentrée 2004 à 3000 à la rentrée 2011.

Le rapport de la Cour des comptes de mai 2010 illustre ce désengagement de l’état attesté par le rapport alarmant de l’Inspection générale qui pointe un manque de moyens d’enseignements de 1300 ETP dans le premier degré et de 2700 dans le second degré. D’ailleurs, la part du PIB consacré à l’éducation est passée de 4,5% à 3,9% entre 1995 et 2006.

Les élèves les plus en difficulté sont les premières victimes de ces choix. Il s’agit bien pour la FSU du renoncement à l’ambition d’une nouvelle étape de démocratisation du système éducatif : volonté de faire disparaître la scolarisation avant trois ans, refus de porter à 18 ans la scolarité obligatoire, reprise de l’objectif européen de 50% de diplômés au niveau 2 de l’enseignement supérieur en cantonnant une partie de la jeunesse au seul « socle commun » et en oubliant l’objectif de 80% d’une classe d’âge au niveau du bac, mise en place de la réforme du lycée qui se traduit par un appauvrissement de l’enseignement, en particulier par la mise à mal de la filière technologique, volonté de développer à tout prix l’apprentissage hors statut scolaire, abandon de la politique d’éducation prioritaire. De même, la FSU dénonce une nouvelle remise en question de moyens alloués aux associations complémentaires de l’école publique, mettant à mal leur capacité d’implication dans l’éducation populaire.

La politique du mérite individuel et la responsabilisation de chacun face à ses difficultés ou ses échecs réduit en réalité la justice sociale à la question des droits individuels avec des conséquences désastreuses pour le « collectif ».

Le Président de la République multiplie les discours sur la sécurité, y compris dans l’éducation, et assortit ses propos de « solutions » qui tiennent avant tout de l’affichage et de la communication : expérimentations à tout va, et éclatement du cadre national.

A chaque problème, on crée une nouvelle structure : ERS (Établissements de Réinsertion Scolaire) pour les élèves perturbateurs, internats d’excellence pour les élèves méritants, expérimentations d’aménagements du temps scolaire, sanctions pour les parents de mineurs délinquants, suspension des allocations familiales comme réponse à l’absentéisme scolaire, établissements CLAIR (Collèges Lycées Ambition Innovation Réussite), pour soit disant sortir de la violence.

Pour la réussite de tous les élèves, il faut au contraire privilégier une conception encore plus collective et solidaire de la construction des apprentissages, investir dans une prise en charge efficace des difficultés scolaires et la réduction des inégalités.

Tous ces choix nationaux pèsent sur les conditions de cette rentrée scolaire 2010 dans l’Oise au point que des représentants des collectivités territoriales, des personnels titulaires de l’État, des usagers, des DDEN…ont décidé de ne pas siéger le vendredi 15 octobre 2010 au Conseil Départemental de l’Éducation Nationale afin de protester contre les conditions dégradées de cette rentrée scolaire.

En effet, cette rentrée 2010 dans le département se caractérise
"-" par une dotation en postes insuffisante dans le premier degré et par la fermeture de 13,5 ETP en collège alors que les effectifs scolarisés sont en augmentation,
"-" par la dégradation programmée des conditions de scolarisation des élèves avec une augmentation des effectifs moyens scolarisés par classe et par division,
"-" par la mise à mal de la scolarisation des moins de trois ans en maternelle, des aides spécialisées, des travaux de groupe en collège,

"-" par la suppression de la formation professionnelle pour les personnels enseignants, de documentation, d’orientation, de vie scolaire,

"-" par la déréglementation en cours qui fait éclater le cadre national en matière de recrutement des personnels, d’organisation des enseignements et de rythmes scolaires tels les établissements labellisés « CLAIR »,

"-" par la concurrence de fait instaurée entre le service public d’éducation et l’école privée par le décret d’application de la loi Carle qui menace directement l’existence du tissu des écoles publiques rurales.

La FSU tient à attirer l’attention des représentants de l’État sur la situation des enfants dont les parents sont demandeurs d’asile. Du fait de l’extrême précarité de leurs conditions d’existence, en particulier en terme d’hébergement, la scolarisation de ces enfants peut en souffrir. La FSU souhaite que cette scolarisation puisse s’effectuer dans les meilleures conditions possibles de régularité et avec toute la sérénité nécessaire dans l’intérêt de ces élèves.

Enfin, face à la posture intransigeante, à l’absence d’écoute et aux provocations à répétition qui caractérisent l’attitude actuelle du gouvernement, la FSU appelle les personnels à participer massivement aux journées d’actions unitaires des 28 octobre et 6 novembre sur la réforme des retraites afin qu’un large débat public et qu’une véritable concertation s’ouvrent sur cette question de société.