LOI SUR LES UNIVERSITÉS.
1) CONFÉRENCE DE PRESSE DU 23 JUILLET 2007.
Il n’est pas fréquent de se retrouver en conférence de presse la
dernière semaine de juillet pour traiter de l’actualité universitaire !
Disons-le tout net : les syndicats du supérieur et de la recherche ne
sont pas des adversaires du changement ; ils se battent depuis longtemps sur leur terrain professionnel au service de la réussite des jeunes et du progrès scientifique. L’université a beaucoup évolué et nous avons des projets concrets de réformes pour une société de partage du savoir.
Mais, alors que l’urgence est un collectif budgétaire notamment pour la
réussite des étudiants, le gouvernement, après une parodie de
concertation, a décrété la procédure d’urgence pour la discussion
parlementaire du projet de loi intitulé : « libertés et responsabilités
des universités ».
Autrement dit, 23 ans après la Loi Savary de 1984, il fallait qu’un
projet de loi soit subitement rendu public mardi 19 juin 2007 et
transmis le vendredi 22 au CNESER pour avis, soit deux jours de
réflexion ! C’est un avis négatif qui a été rendu à une forte majorité,
après une déclaration condamnant la procédure et le contenu. Amendé
ensuite avec des replis tactiques et des aggravations, le texte a été
voté par le Sénat le 12 juillet. C’est aujourd’hui qu’il est présenté au
vote express des députés.
Au-delà de cette méthode expéditive, il y a les objectifs servis par ce
nouveau cadre sous les mots–clés « autonomie » et « gouvernance », avec l’éclairage de la lettre de mission de Nicolas Sarkozy à Valérie
Pécresse. Chacun sait que les structures, notamment le Conseil
d’Administration resserré, sont un moyen, et non une fin. L’objectif est
en fait de recomposer le paysage universitaire en instituant des
mécanismes concurrentiels entre universités et entre individus en
réduisant l’expression et le contrôle démocratique, à l’opposé d’une
logique de service public.
L’accès des jeunes aux études serait limité : désengagement financier de l’état sur les filières jugées pas assez formatées sur un emploi
déterminé et subordonnées à la contribution financière des familles ;
mais aussi sur les masters pour lesquels le gouvernement n’a pas renoncé à la sélection, tant côté professionnel que recherche, alors que la France est en retard sur les taux de diplômés.
Au-delà du texte, la lettre de mission est révélatrice des intentions
qui inspirent ce projet : contenir les flux étudiants, subordonner les
formations et la recherche à des logiques utilitaristes, donner au
président un tableau de bord étendu sur la prise de décision au
détriment de la collégialité.
La situation des acteurs serait fragilisée ainsi que leurs statuts :
recours à l’emploi précaire dans toutes les catégories (BIATOSS,
enseignants-chercheurs et chercheurs), jeu de l’arbitraire local sur les
recrutements, les charges de service et les primes. Quant aux étudiants
étrangers, le ministère Hortefeux est chargé de mettre en place leur tri
sous le label « compétences et talents » …
L’hypothèse de suppression d’un fonctionnaire sur deux, dont 17 000 à
l’Education nationale, inclut l’enseignement supérieur et priverait
d’accès à l’emploi nombre de jeunes étudiants, notamment ceux qui se
destinent aux métiers de l’enseignement.
Avec toutes ces mesures bout à bout, c’est tout à la fois le droit aux
études, les libertés académiques et le pluralisme des idées, le droit du
travail et les statuts nationaux qui sont mis en cause.
De nombreux Conseils d’Université ont pris position contre ce projet,
pour son retrait du calendrier parlementaire, ou à tout le moins pour un
report laissant place au nécessaire débat des Assises Nationales
ouvertes le 2 juillet à La Sorbonne et appelées à se décliner dans les
établissements. Des AG se sont prononcées. Des pétitions sont en cours, celle intitulée « pas à la sauvette », ainsi que l’Appel des Cordeliers avec plus de 2 300 signatures depuis 5 jours.
Nos syndicats prendront leurs responsabilités en appelant à des AG pour décider des initiatives à entreprendre : contre les dispositions de
cette loi si elle est votée, mais aussi pour défendre l’emploi dans
l’ensemble de la fonction publique par des actions pouvant aller jusqu’à
la grève, et enfin au sujet d’autres projets de loi actuellement en
discussion au Parlement.
La situation est grave : c’est en se groupant que l’on peut peser sur le
cours des choses, alerter l’opinion, interpeller les parlementaires,
poser les termes d’une alternative. Au nom de l’Intersyndicale E S R,
nous remercions tous ceux qui, malgré le calendrier, ont répondu présent à cette initiative ou ont adressé un message. Ce large éventail des générations, des associations, des personnalités et des syndicats est un très grand encouragement à rester unis pour dessiner ensemble un autre avenir.
LDH, SM, FCPE, ATTAC, SLR, JEC, TC, UNL, GFEN, RUSF, SNESUP FSU, SNCS FSU, SNTRS CGT, Sup Rech.UNSA, AI UNSA, SNASUB FSU, FSU, UGICT CGT, SNPTES UNSA, SNPREES FO, SNEP FSU, Solidaires, FERC CGT, SUD Recherche, HNS info.
2) APPEL DES CORDELIERS.
Présentation de l’appel des Cordeleirs
Le contenu du projet de loi « libertés et responsabilités des
universités », tel qu’adopté le 12 juillet 2007 par le Sénat, est
inacceptable.
Ce texte institue une autonomie concurrentielle des universités et ouvre
la porte à leur développement inégalitaire favorisé par la course aux
financements extérieurs (fondations, ..) et par le désengagement de
l’Etat. Il met à mal les métiers des personnels, à commencer par ceux
des enseignants-chercheurs, des chercheurs, et leurs conditions de
recrutement. Il déroge gravement au statut de la fonction publique en
autorisant les présidents d’université à recruter des personnels
contractuels (en CDD ou en CDI) pour remplir des missions pérennes de
service public, notamment pour des emplois techniques et administratifs.
Il touche aux fondements démocratiques de notre société. Il ne répond
pas aux besoins de la société en matière d’enseignement supérieur et de
recherche.
Le texte voté au Sénat aggrave encore les dispositions du projet.
Les organisations syndicales dénoncent le refus du gouvernement, en
dépit des promesses électorales, d’engager un collectif budgétaire pour
améliorer, dès la rentrée, les conditions d’études et de vie des
étudiants, la situation des universités, de la recherche publique, de
leurs personnels.
Dès à présent, plus de trente instances universitaires, Conseils
d’Administration ou Congrès, ont exprimé les raisons de fond du rejet de
ce projet par la communauté universitaire et scientifique. Dans les
établissements, de très nombreuses AG se sont prononcées pour le retrait de ce projet de loi.
Le gouvernement veut passer en force cet été. Notre engagement syndical doit se poursuivre cet été. C’est pourquoi nous vous appelons à signer l’ « Appel des Cordeliers » [1] qui exige l’abandon de cette réforme, condition nécessaire pour ouvrir un large débat impliquant les
communautés scientifiques, et au delà l’ensemble de la société
française, par le retrait de cette loi ou son abrogation
(1) Texte proposé le 11 juillet 2007 à l’appel de SNESUP-FSU, SNCS-FSU,
SNASUB-FSU, ?SNEP-FSU, SNTRS-CGT, CGT-INRA, FERC-Sup-CGT, UN-CGT-CROUS, SUD Education, ?SUD Etudiant, SUD-Recherche-EPST, Sup’Recherche-UNSA, SNPTES-UNSA, A&I UNSA, ?SNPREES-FO, et adopté à l’assemblée tenue aux Cordeliers (Paris).